Par Naomi Mercier, Archiviste de projet

E. L’espérance, Séminaire de Gaspé, entre les années 1926 et 1938. GLC C-8.4.3.1.

Le 25 novembre 1922, François-Xavier Ross (1869-1945) est nommé premier évêque de Gaspé. Un grand nombre de projets pour développer la région l’habitent déjà, dont celui de fonder à Gaspé un petit séminaire. Il approche dès lors des organisations religieuses afin d’en trouver une qui acceptera d’en prendre la responsabilité. L’année suivante, Mgr Ross écrit au supérieur provincial jésuite, le père John Milway Fillion, pour donner suite à des discussions qu’ils ont précédemment entretenues à propos de leur potentiel intérêt pour ce projet. Quelques jours plus tard, ce dernier propose à l’évêque un arrangement possible, qu’il soumettra au supérieur général de la Compagnie. En janvier 1924, l’offre est acceptée par le supérieur général et l’entente est conclue : ce sont les jésuites qui assumeront la responsabilité du Séminaire de Gaspé.

On confie la conception des plans du séminaire à l’architecte Pierre Lévesque (1880-1955). Les fondations du bâtiment sont jetées dès novembre 1923, mais les travaux prennent du retard et ne s’enclenchent réellement qu’en 1924.

Mgr Ross entouré de pères jésuites et séculiers, 1929 ou 1930. GLC C-8.4.1.1.

Le 11 septembre 1926, le Séminaire de Gaspé accueille finalement ses premières classes. Ce sont quatre pères jésuites qui assument les tâches d’enseignement, aidés par des pères séculiers.

Le fonds du Séminaire de Gaspé, conservé par les AJC, est composé d’une correspondance qui laisse voir les dessous de cette entreprise et les difficultés qu’elle a connues durant ses premières années. Dès la fin de l’été 1926, le père Olivier H. Beaulieu, recteur du Séminaire, expose au supérieur provincial les besoins qui ne sont pas comblés en matière de personnel. Les difficultés à recruter du personnel du côté de l’évêché de Gaspé répondent à celles des jésuites à envoyer des hommes qui pourront assumer les tâches d’enseignement.

Ces difficultés, mais aussi les fiertés engendrées par les performances des étudiants, la bonne entente et les réalisations du séminaire, transparaissent dans toute la correspondance entretenue entre les supérieurs de Gaspé, les provinciaux jésuites et Mgr Ross au fil des années. Malgré les embuches, le séminaire accueille des étudiants qui se démarquent dans les concours intercollégiaux. René Lévesque (1922-1987), qui deviendra plus tard un journaliste notoire puis premier ministre du Québec, fréquente lui aussi le séminaire. Il apparaît d’ailleurs sur deux photographies du fonds d’archives.

En 1938, Mgr Ross libère finalement les jésuites et laisse la responsabilité du Séminaire de Gaspé aux Clercs de Saint-Viateur. Ces derniers continuent le travail entamé par les jésuites jusqu’en 1947, date où les pères du diocèse reprennent à leur tour la responsabilité de l’établissement. En 1967, dans le mouvement des réformes qui découlent des recommandations de la Commission Parent (1961-1964), le séminaire est remplacé par le Cégep de la Gaspésie et des Îles.

Séminaire de Gaspé, vers 1930-1932, GLC C-8.4.3.19.1 

Encore aujourd’hui, le cégep se trouve dans le bâtiment original, construit il y a maintenant cent ans, du petit séminaire. Des agrandissements ont été ajoutés au pavillon original et certaines installations ont été reconverties pour répondre à de nouveaux besoins. Les efforts de l’évêque de Gaspé et des jésuites auront été le point de départ pour l’installation pérenne d’un établissement scolaire permettant à la population d’une région éloignée des grands centres d’avoir accès à l’éducation postsecondaire, et ce, sans avoir à quitter la Gaspésie.

Pour en savoir plus sur le fonds du Séminaire de Gaspé, vous pouvez consulter sa fiche descriptive dans notre catalogue.


Source externes au fonds

Dupuis, S. (2020). La Commission royale d’enquête sur l’enseignement dans la province de Québec (Commission Parent). L’encyclopédie canadienne. https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/la-commission-royale-d-enquete-sur-l-enseignement-dans-la-province-de-quebec-commission-parent

Lavoie, L. (1995). Mgr François-Xavier Ross. Cap-aux-Diamants, (41), 82. https://www.erudit.org/fr/revues/cd/1995-n41-cd1041903/8713ac.pdf

Gouvernement du Québec. [s.d.] Ancien séminaire de Gaspé. Répertoire du patrimoine culturel du Québec. https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/detail.do?methode=consulter&id=233311&type=bien

Assemblée nationale du Québec. (2016). René Lévesque. https://www.assnat.qc.ca/fr/deputes/levesque-rene-4219/biographie.html

Par Naomi Mercier, Archiviste de projet

Louis-Adolphe Huguet-Latour (1812-1904) est l’un des rares laïcs dont les AJC conservent les archives. Légués à sa mort au Collège Sainte-Marie, plusieurs de ses documents sont entrés par le fait même dans la plus grande collection que détiennent les AJC – la Collection des Archives du Collège Sainte-Marie. Cette pratique était courante parmi les amis des jésuites, des hommes instruits qui évoluaient dans les mêmes cercles. Cet article se penche sur le contenu de son fonds personnel, acquis quelques décennies plus tard.

En 1863, Huguet-Latour publie la première édition de l’Annuaire de Ville-Marie : origine, utilité et progrès des institutions catholiques de Montréal. Dès les premières pages, il fait valoir toute l’importance qu’il accorde au méticuleux travail de consignation des informations permettant de préserver et de construire la mémoire des sociétés :

« Les lacunes, que, forcément, nous serons obligé de laisser quelques fois dans notre plan ainsi conçu, montreront peut-être l’importance pour chaque paroisse, pour chaque maison, chaque collège ou communauté, pour chaque société et même, si l’on veut, pour chaque respectable famille d’avoir un livre distinct et séparé des registres de comptabilité, pour y inscrire, en temps opportun, tout ce qui se rattache historiquement, et à son point de vue, à chaque corps ainsi constitué. Que de belles pages nous aurions aujourd’hui, avec cette méthode, dans cette histoire intime du Canada ! »

Couverture de L’Annuaire de Ville-Marie, Bibliothèque des Jésuites au Canada.

Né d’une famille de la bourgeoisie montréalaise en 1812, Huguet-Latour devient notaire en 1847. Dans les années 1850, il intègre la milice de Montréal, tout comme son père—lui aussi notaire—l’avait fait avant lui.

Parallèlement, il s’implique dans plusieurs sociétés culturelles, dont la Société de tempérance du diocèse de Montréal. Son implication personnelle s’inscrit dans un phénomène social qui prend de l’ampleur dès la fin des années 1840, avec le mouvement initié par le père Charles Chiniquy. Huguet-Latour s’implique aussi dans la Société historique de Montréal, fondée en 1858 par Jacques Viger, de laquelle il devient le premier bibliothécaire.

C’est en effet son intérêt pour l’histoire du Canada et son désir d’en préserver la mémoire qui semble avoir réellement marqué la vie de Huguet-Latour. Les AJC possèdent un fonds d’archives témoignant de son travail de collecte de données portant sur une grande variété de sujets, allant d’observations sur la météorologie de Montréal jusqu’à l’inventaire des livres rares du Collège de Montréal, en passant par des listes de notaires, de procureurs, de chirurgiens…


Graphique des températures mensuelles de Montréal entre 1849 et 1852. GLC BO-81.2.7.1.9.

Le fonds contient aussi des documents qui ne le concernent pas toujours directement, mais qui démontrent son intérêt pour la conservation des témoins de l’histoire. En effet, ce sont sans doute ses notes historiques concernant l’histoire du Bas-Canada qui occupent le plus de place au sein de cette collection de données. Une partie de celles-ci lui ont d’ailleurs servi pour l’écriture de son Annuaire de Ville-Marie. Il a aussi laissé aux jésuites une relique et deux documents signés de la main de Marguerite Bourgeoys.

Liste chronologique de l’introduction de diverses espèces d’arbres en Europe, milieu du 19e siècle. GLC BO-81.2.5.1.7.

Son fonds d’archive comporte en outre une importante correspondance avec divers instituts scientifiques qui témoigne de son intérêt envers la création de riches lieux de savoirs. Pendant plusieurs décennies, Huguet-Latour s’est en effet donné pour mission d’aider ces institutions à constituer leurs bibliothèques et à y inclure des écrits sur l’histoire du Canada en leur faisant parvenir bon nombre de livres et de brochures.


Sources externes

Brault, J.-R. (1993). La société historique de Montréal 1858-1993. Cap-au-diamants, (34), p. 55.

Saint-Pierre, J. (2002). Le mouvement de la tempérance. Encyclobec.

Jesuit Higher Education: A Journal, une publication en libre accès, a publié un article du directeur des AJC, François Dansereau, sur les fonds d’archives.

Résumé:

Cet article court présente sur l’étendue des ressources archivistiques conservées aux Archives des jésuites au Canada (AJC), situées à Montréal, au Canada. Il décrit les caractéristiques de la collection d’archives, en mettant l’accent sur les documents historiques qui témoignent de l’implication des jésuites au Canada dans les activités et les institutions éducatives. L’article se termine par des réflexions sur les stratégies contemporaines des AJC, en particulier en ce qui concerne les documents d’archives sur les peuples autochtones, et en soulignant le soutien des AJC aux chercheurs.

Cliquez ici pour le lire (uniquement disponible en anglais) !

Les Archives des jésuites au Canada (AJC) sont à la recherche d’un.e candidat.e au poste d’archiviste de projet, en association avec le programme Jeunesse Canada au Travail. Le stage est d’une durée de 24 semaines, prévu de débuter le 23 septembre 2024 et se terminant le 21 mars 2025. Les AJC sont situées à Montréal, Québec. Le stage va se dérouler dans nos locaux de la Maison Bellarmin, situés à Montréal. Le taux horaire du stage est de 21.00$ de l’heure (35 heures/semaines; projet de 24 semaines; congés fériés non-payés; 10-12 journées de congé à confirmer pendant la période des fêtes de la fin décembre/début janvier).

Les AJC offrent un point d’accès à ses collections ainsi que des ressources concernant l’histoire des jésuites au Canada. Les AJC soutiennent la recherche des membres de la communauté jésuite, généalogistes, chercheurs.euses académiques, chercheurs.euses autochtones, artistes et étudiant.e.s provenant d’une variété de disciplines. La Bibliothèque et les livres rares AJC contiennent plus de 37 000 livres et autre matériel publié, incluant 1 500 livres rares. La collection d’archives comprend plus de 1.5 km de documents textuels, plus de 500 000 photographies, plus de 1 000 cartes et documents cartographiques, des centaines de documents audio-visuels et ainsi que des documents nés-numériques.

L’objectif principal du projet est le traitement de différents fonds qui témoignent de la présence et des activités des jésuites dans la région du nord de l’Ontario, de 1844 jusqu’à maintenant. Le projet inclut l’évaluation, le traitement et la création d’instruments de recherche pour les fonds sélectionnés. Le projet comprend également la numérisation de documents (textuels et photographiques) sélectionnés, pertinents à la recherche à long terme déjà en cours. Au total, les fonds identifiés pour le traitement comprennent environ trois mètres de documents textuels et environ 2 000 photographies. Le candidate ou la candidate va créer un inventaire au niveau du dossier pour chaque fonds, ainsi qu’un instrument de recherche au niveau du fonds afin d’améliorer la découvrabilité du matériel. Ces descriptions vont être rendues disponibles sur notre plateforme en ligne. À ce titre, le candidat ou la candidate sélectionné.e va travailler selon les normes descriptives et les gabarits normalisés pour le traitement de fonds utilisés aux AJC. L’archiviste de projet va également rédiger des rapports sur l’évolution et la portée du projet.

Cette initiative de traitement de fonds d’archives est proposée afin d’améliorer la découvrabilité des archives qui témoignent les rencontres entre jésuites et différentes nations et communautés autochtones. La priorité accordée au traitement de ces fonds s’effectue dans le contexte d’un engagement des AJC face aux chercheurs.euses autochtones par rapport aux archives qui les concernent.

VÉRITÉ ET RÉCONCILIATION AVEC LES PEUPLES AUTOCHTONES

Les AJC sont engagées dans un processus de vérité et de réconciliation avec les peuples autochtones. Les AJC soutiennent la résurgence autochtone. Le candidat ou la candidate sélectionné.e va devoir démontrer une compréhension des défis principaux par rapport aux conceptions et pratiques archivistiques. Le candidat ou la candidate doit être familier.ère avec les principes énoncés dans les appels à l’action de la Commission vérité et réconciliation du Canada, avec le rapport du Groupe de travail sur la réponse au rapport de la Commission vérité et réconciliation du Comité directeur sur les archives canadiennes, en plus de démontrer une compréhension des orientations stratégiques au niveau national et international
concernant les peuples autochtones et les archives associées.

QUALIFICATIONS ET COMPÉTENCES

  • Récemment diplômé.e. Formation de niveau universitaire en archivistique/sciences de l’information ou dans un domaine connexe, avec un intérêt démontré pour les théories et pratiques archivistiques. Une maîtrise en Sciences de l’information avec une concentration en archivistique est un atout.
  • Capacité démontré reliée à l’utilisation d’outils de gestion de collections et connaissance des Règles de description archivistiques (RDDA);
  • Intérêt pour les archives numériques, incluant les pratiques et les procédés de la numérisation;
  • Capacité à communiquer de l’information à de petits et grands groupes`
  • Capacité à communiquer à l’oral et à l’écrit en anglais, avec des connaissances de base en français
  • Capacité à travailler de manière indépendante et en équipe sur des initiatives collaboratives;
  • Capacité à développer des objectifs et à mettre en œuvre des procédures.

La langue principale des documents avec lesquelles le ou la stagiaire devra composer sont en anglais, mais quelques documents sont en français. Le candidat ou la candidate sélectionné.e doit être en mesure d’écrire en anglais. Les activités quotidiennes aux AJC se déroulent principalement en français. Les activités de communication avec le public se déroulent en français, en anglais ou dans les deux langues, tout dépendant des chercheurs.euses, des projets et du public visé. Le candidat ou la candidate sélectionné.e doit être confortable dans un climat de travail bilingue.

Le stage se déroulera à Montréal, Québec, une ville avec une population diverse. Il s’agit d’un environnement urbain avec diverses institutions universitaires et culturelles.

Une préférence sera accordée aux candidat.e.s autochtones. Les candidat.e.s visé.e.s par l’équité en matière d’emploi du Gouvernement du Canada sont invité.e.s à postuler.

Pour obtenir plus d’information concernant les AJC, veuillez visiter notre site web : https://archivesjesuites.ca/

La date limite pour postuler est le 17 juin 2024.

Les applications, devant inclure une lettre de présentation et un curriculum vitae, dans un seul document Word ou PDF, doivent être envoyées à François Dansereau, Directeur des archives des jésuites au Canada : CANAJCdirection@jesuites.org.

Les candidat.e.s doivent être éligibles au Programme Jeunesse Canada au Travail et soumettre leur candidature à travail le Portail. Pour plus d’information: https://jeunesse-canada-travail.canada.ca/

Nous remercions les personnes ayant signalé leur intérêt pour le stage. Les personnes sélectionnées pour la liste courte seront contactées pour une entrevue. Les informations personnelles incluses dans les candidatures vont être utilisées uniquement pour le processus de recrutement.

Le directeur des AJC, François Dansereau, a récemment accordé une entrevue à l’Association canadienne des archivistes dans le cadre de leur série de blogues, « In the Field ». Il partage son parcours académique, la manière dont il est arrivé à travailler aux AJC et les défis auxquels font face les archives religieuses d’aujourd’hui. Pour lire l’intégralité de l’entrevue, cliquez ici: Association of Canadian Archivists – A Spotlight on Religious Archives with François Dansereau.

Lorsque les jésuites reviennent au Canada au début des années 1840, ils répondent entre autres à l’invitation de l’évêque de Montréal, Mgr Bourget, qui rêve d’un nouveau collège pour desservir la population catholique de la ville. L’éducation, en effet, est une mission fondamentale et un domaine d’expertise séculaire de la Compagnie de Jésus. Avec cette série, nous partageons avec vous quelques histoires dénichées dans les fonds d’archives des collèges fondés par les jésuites.


Collège Jean-de-Brébeuf [194-?]. GLC C-6.103.19.1

Le 24 octobre 1929, le krach de la bourse de New York marque le début de la Grande Dépression. Durant les années 1930, la crise se propage à travers le monde et le Québec n’échappe pas à la tempête. Le Collège Jean-de-Brébeuf, fondé à peine un an auparavant, ne fait pas exception, comme en témoignent les traces laissées par crise dans les documents d’archives.

Les inquiétudes liées à la crise

Lors de la consulte du 3 septembre 1932, la lecture des états financiers est l’occasion de faire un bilan des quatre premières années d’activités du Collège. En matière de dépenses, l’heure est à la prudence :

Le P. Ministre trouve raisonnable cette sévérité vu la dette énorme du Collège, la crise économique pouvant se prolonger, les dépenses faites pour rendre le Collège très attrayant et aussi vu la perspective de la construction de la salle académique ne pouvant être entreprise qu’après une notable réduction de la dette.

Registre des consultes, 3 septembre 1932. GLC C-6.S1.SS4.2.1.1.1

Le registre des consultes du Collège Jean-de-Brébeuf

La consulte est une instance habituellement composée de trois ou quatre membres d’expérience du personnel jésuite, chargés de conseiller le recteur sur diverses questions relatives au fonctionnement du Collège. De 1928 à 1968, les consulteurs se rencontrent à fréquence variable – environ une ou deux fois par mois pendant l’année scolaire – et les comptes-rendus de ces réunions sont consignés dans un grand registre.

On y discute entre autres de gestion des ressources matérielles ainsi que d’enjeux légaux, pédagogiques et disciplinaires. Entre mars et juillet 1934, ce sont toutefois les questions de nature financière qui occupent surtout les consulteurs.

Le 3 juin 1934, on s’inquiète notamment de la baisse de fréquentation du Collège :

La diminution des élèves, avec les arrérages, complique le problème de nos finances. Que faire pour attirer des élèves ou ne pas perdre ceux qui se présentent? – Évidemment le coût élevé de la pension effraie plusieurs parents, serait-il à propos de casser nos prix? 

Registre des consultes, 3 juin 1934. GLC C-6.S1.SS4.2.1.1.1

Des impacts dans le quotidien des élèves et de la communauté jésuite du Collège

Afin de se prémunir contre la crise, les consulteurs proposent diverses solutions. Le 19 janvier 1932, le registre rapporte une décision de la consulte afin d’alléger le budget. Il n’y a pas de petites économies et les sacrifices passent par la privation de boissons gazeuses… et de ketchup!

2.- Pour se conformer à la circulaire du T.R.P. Général, faisant appel, en ces temps de grandes misères, à une économie plus sérieuses, en vue d’aider les pauvres et de soulager le budget de chaque maison, voici la décision de la consulte: 1) supprimer la sauce aux tomates en bouteille. 2) " le petit verre de vin aux jours de campagne et de fête des BB. 3) supprimer les eaux gazeuses, excepté l’eau minérale. 4) " les 3e classe. 5) les fêtes de 1e et 2e descendent d’un cran. 6) l’économie sur le beurre a été ratée.
Registre des consultes, 19 janvier 1932. GLC C-6.S1.SS4.2.1.1.1

Le 2 mars 1933, les consulteurs s’opposent pour des raisons similaires à l’installation d’une nouvelle fournaise qui permettrait de fournir de l’eau chaude pendant les vacances.

Est-il avantageux d’installer une nouvelle fournaise pour fournir l’eau chaude des vacances? Toujours pour raison d’économie tous se prononcent contre cette installation. Pendant le temps du ménage jusqu’au 15 juillet environ nous nous servirons de la fournaise à vapeur et ensuite nous nous contenterons de la petite fournaise installé près de l’ascenseur de la résidence.

Registre des consultes, 2 mars 1933. GLC C-6.S1.SS4.2.1.1.1

Si ces mesures concernent d’abord et avant tout les membres de la communauté jésuite, d’autres entraînent aussi des conséquences sur la vie des élèves. Le 1er juin 1933, les consulteurs proposent par exemple de supprimer, à cause de la crise, la remise des prix des jeux, une cérémonie visant à honorer les exploits sportifs des étudiants. Quelques mois auparavant, le 2 mars 1933, les consulteurs s’interrogent, par souci d’économie, sur la pertinence d’imprimer le Palmarès, une publication annuelle rapportant la liste des lauréats des prix remis aux élèves méritants. Le 1er novembre 1934, ce sont les dépenses liées au conventum des élèves de Rhétorique qui sont remises en cause :

[…] portraits, bagues, banquet on aimerait à voir baisser ces frais. Le portrait et le banquet sont autorisés par la coutume, la bague l’est moins […].

Registre des consultes, 1er novembre 1934. GLC C-6.S1.SS4.2.1.1.1

La prospérité retrouvée

Les conséquences de la crise vont toutefois au-delà de ces désagréments quotidiens et retardent les projets d’agrandissement du Collège. En effet, malgré les aléas de la crise, la fréquentation demeure élevée et le besoin d’ajouter des locaux supplémentaires, dont une salle académique, une bibliothèque plus vaste et un gymnase, se fait sentir dès les premières années. Ce n’est toutefois qu’en 1956, à la faveur de la prospérité d’après-guerre et d’une importante campagne de souscription menée par le Collège, qu’un premier pas vers cet objectif est franchi avec le début des travaux de construction d’une nouvelle annexe, le pavillon Lalemant.

Brochure promotionnelle pour la campagne de souscription visant à recueillir des fonds pour la construction du pavillon Lalemant, 1955.
GLC C-6.S3.SS2.2.2.2.3

Les AJC conservent le fonds d’archives du Collège Jean-de-Brébeuf, de sa fondation par la Compagnie de Jésus en 1928 jusqu’à la cession de sa gestion à une corporation laïque en 1986. Pour en savoir plus, consultez sa fiche descriptive dans notre catalogue.

Cette année, pour illustrer la carte de Noël des Archives des jésuites au Canada (AJC), nous avons puisé dans une pièce remarquable de notre collection. Il s’agit d’une scène de l’Adoration des mages tirée du livre d’Heures de Philippe de Montholon, daté de la fin du 15e siècle.

Les livres d’heures sont des recueils de prières quotidiennes destinés aux laïcs. Ils sont le pendant des bréviaires, utilisés par les clercs, qui rassemblent les prières récitées à l’occasion des huit offices de la journée. Les premiers livres d’heures apparaissent au 13e siècle et connaissent une large diffusion au cours des siècles suivants. Souvent richement enluminés, ils sont d’abord destinés à l’aristocratie, puis se répandent graduellement à d’autres couches de la société. Ils sont généralement de petite taille de façon à pouvoir être transportés.

La mise sur pied en 2018 de l’exposition Resplendissantes enluminures. Livres d’Heures du XIIIe au XVIe siècle dans les collections du Québec au Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) a donné l’occasion à une équipe de chercheur.euse.s dirigée par Brenda Dunn-Lardeau, professeure au Département d’études littéraires de l’UQAM, d’approfondir les connaissances au sujet de ce précieux manuscrit. Nous ne savons pas avec certitude quand et comment il est entré dans la collection des AJC, mais nous savons qu’il en fait partie depuis au moins 1892, date à laquelle le père Arthur E. Jones, successeur du père Félix Martin à la tête des Archives du Collège Sainte-Marie, l’a prêté pour une exposition de la Société de numismatique et d’archéologie de Montréal.

Il est toutefois possible que le manuscrit soit arrivé au Québec bien avant. Nous savons en effet que de tels ouvrages circulaient en Nouvelle-France. Les religieuses hospitalières de Québec en réclamaient régulièrement auprès de leurs bienfaiteurs européens au bénéfice des malades, et des passages des Relations des jésuites nous apprennent que ces derniers en faisaient usage lors de leurs missions. L’une des hypothèses est que le manuscrit soit parvenu aux Ursulines de Québec par l’intermédiaire de Catherine

de Montholon, descendante de l’un de ses premiers propriétaires, Philippe de Montholon. À la mort de son mari, Catherine de Montholon s’est retirée chez les Ursulines de Dijon, qui étaient elles-mêmes les bienfaitrices des Ursulines de Québec. Si le manuscrit se trouvait bel et bien en sol canadien avant la suppression de la Compagnie de Jésus à la fin du 18e siècle, le père Félix Martin pourrait l’avoir récupéré lors du retour des jésuites au Canada en 1842. En effet, avant son décès en 1800, le père Jean-Joseph Casot, dernier survivant jésuite d’avant la suppression, avait confié une partie des documents de l’ordre aux religieuses hospitalières de l’Hôtel-Dieu de Québec. Les documents récupérés au 19e siècle par le père Martin forment le noyau initial de la Collection des Archives du Collège Sainte-Marie, l’un des fondements de l’actuelle collection des AJC.

D’autres hypothèses demeurent toutefois à explorer et il n’est pas exclu que le manuscrit ait été intégré à la collection plus tardivement. Le livre d’Heures de Philippe de Montholon n’a pas encore livré tous ses secrets ! On peut en apprendre davantage à son sujet dans la notice rédigée par Brenda Dunn-Lardeau, Helena Kogen et Geneviève Samson dans le magnifique Catalogue raisonné des livres d’heures conservés au Québec produit dans la foulée de l’exposition du MBAM.

Références :

Dunn-Lardeau, B. (dir.). (2018). Catalogue raisonné des livres d’Heures conservés au Québec. Presses de l’Université du Québec. https://doi.org/10.2307/j.ctvt1shn9

Biron, J. (2016). Enquête sur la provenance et les pérégrinations de deux livres d’Heures enluminés du XVe siècle conservés aux Archives des jésuites au Canada. Renaissance and Reformation / Renaissance et Réforme, 39(4), 19–72. https://doi.org/10.33137/rr.v39i4.28159

Aujourd’hui, les Archives des jésuites au Canada (AJC) fêtent l’anniversaire de Félix Martin, s.j. (1804-1886), supérieur de jésuites du Bas-Canada, fondateur du Collège Sainte-Marie, et archiviste. L’histoire du père Martin est inextricablement liée à l’histoire de la Compagnie de Jésus au Canada après sa restauration.

Félix Martin, s.j. (debout au centre à droite avec les bras croisés) parmi les jésuites au Collège Sainte-Marie. C-1.247

Bien que les jésuites du Canada n’aient pas été contraints de retourner en Europe lorsque la Compagnie de Jésus a été supprimée en 1773 sur le continent et dans ses missions à travers le monde, il était interdit aux nouveaux missionnaires de se joindre à eux. Après le décès en 1800 du dernier des jésuites d’avant la suppression, il a fallu attendre quarante-deux ans pour que la Compagnie de Jésus reprenne ses missions au Canada. Les précieux documents de la première génération de jésuites ont été détruits, perdus, donnés à d’autres entités ou ramenés en France

Lorsque le Père Martin est arrivé au Canada en 1842, parmi le premier groupe de missionnaires à revenir après la restauration, il a commencé à recueillir et à préserver les documents qui avaient survécu. L’histoire de la restitution des documents qui avaient été confiés aux sœurs hospitalières de l’Hôtel-Dieu de Québec par le dernier jésuite au Canada fait maintenant partie de l’histoire des origines de l’AJC. Lorsqu’il fonda le Collège Sainte-Marie à Montréal, le père Martin mit sur pied les archives qui contenaient à la fois les documents de pré-suppression qu’il avait recueillis et les futurs documents relatifs au Collège Sainte-Marie et aux activités des Jésuites au Canada.

Aujourd’hui, les AJC conservent les documents, les écrits et les publications du père Martin, ainsi qu’un certain nombre de croquis, de dessins et de peintures de structures architecturales et de paysages pour lesquels il était connu. En effet, outre son talent d’archiviste, Martin était un artiste architectural talentueux. Bien que son œuvre la plus célèbre est probablement son aquarelle du Collège Sainte-Marie, les images suivantes démontrent l’étendue des intérêts de Martin en tant qu’artiste :

Pour en savoir plus sur nos fonds concernant le père Martin, consultez sa fiche dans notre catalogue en ligne ici.

Le directeur des Archives des jésuites au Canada, François Dansereau, a récemment parlé avec Fannie Dionne, historienne de projet chez les Jésuites au Canada, sur le rôle des archives dans le cadre de la vérité et de la réconciliation. Il souligne l’importance de l’accès aux archives et de la communication avec les chercheurs et communautés autochtones, ainsi que de trouver des nouvelles manières de mieux refléter la culture autochtone dans les archives.

Pour lire l’article au complet ici: https://presence-info.ca/article/actualite/culture/pensionnats-pour-autochtones-des-sources-aux-archives/

Le média indépendant Présence – information religieuses a récemment visité les AJC pour en savoir plus sur les fonds d’archives conservés et les priorités de l’équipe.

Le journaliste Frédéric Hountondji s’est entretenu avec le directeur des AJC, François Dansereau, sur le rôle du centre d’archives dans le soutien aux chercheurs et aux groupes de recherche autochtones, et sur le respect de l’appel à l’action de la Commission de vérité et réconciliation ainsi que de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.

C’est vraiment l’une des priorités du centre d’archives, qui consiste à faciliter les recherches effectuées par les chercheurs autochtones. Cela peut vouloir dire qu’on essaie de faire émerger les sujets qui les concernent.

Suivez ce lien pour lire l’article complet : https://presence-info.ca/article/actualite/patrimoine/les-ajc-une-vitrine-des-jesuites-du-canada/